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Paru dans le mensuel du SNESUP

L’informatique, une filière particulièrement en tension, l’exemple de Paris-13

samedi 22 octobre 2022, par Marc Champesme

Depuis l’essor de l’informatique à la fin des années 1980, cette filière a toujours connu une situation de sous-encadrement chronique à l’université, malgré un franc succès auprès des étudiants. L’augmentation considérable des effectifs étudiants ne s’est accompagnée d’aucune hausse des moyens alloués à cette discipline.

« Accélérer la transformation numérique du service public et des entreprises », « faire de la France un leader mondial de l’intelligence artificielle », « stratégie nationale sur les technologies quantiques » : la communication gouvernementale est toujours tonitruante lorsqu’il s’agit du numérique. Malheureusement, comme nous en avons l’habitude, il y a un gouffre entre les déclarations et la réalité vécue dans les universités par les étudiants et les personnels.

À voir l’augmentation impressionnante des inscriptions en licence d’informatique à l’université, il semble que cette communication ait été prise au sérieux par une large partie de la jeunesse : entre 2012 et 2021, les inscriptions en licence d’informatique ont ainsi bondi de près de 88 % (+93 % pour les seules inscriptions en première année). Dans certaines universités cette augmentation est même encore plus importante : à l’université Paris 13, l’augmentation atteint 156 % (+179 % en première année). Tout cela sans compter les nombreux lycéens laissés sur le carreau par Parcoursup faute de capacité d’accueil suffisante.

L’informatique n’est cependant pas la seule discipline, ni même la plus touchée par cette augmentation des effectifs : dans le secteur disciplinaire des « Sciences fondamentales » le nombre d’étudiants inscrits en licence a augmenté de 76 %, et pour certaines disciplines comme la chimie l’augmentation atteint 124 % sur la même période Cependant, l’informatique cumule certaines spécificités qui rendent la situation critique : tout d’abord, l’informatique est la discipline qui attire le plus d’étudiants en sciences fondamentales (20 % des inscriptions en licence de sciences fondamentales, juste devant les mathématiques avec 19 % des étudiants), de plus, des enseignements d’informatique ont progressivement été intégrés à l’ensemble des cursus en sciences et, surtout, l’informatique à l’université est en situation de sous-encadrement chronique depuis l’essor de cette discipline à la fin des années 80, ce qui était beaucoup moins le cas des autres disciplines scientifiques.

Cette augmentation considérable des effectifs étudiants en informatique ne s’est accompagné d’aucune hausse des moyens : bien au contraire, sur la dernière décennie les effectifs d’enseignants titulaires en informatique (section 27 du CNU) ont diminués de 1 % (34 postes en moins) ! Si l’on ajoute à cela le manque de locaux d’enseignement, les équipes pédagogiques se retrouvent dans une situation intenable où elles doivent constamment arbitrer entre la volonté de faire réussir les étudiants et celle de réduire les moyens consacrés à chaque étudiant. Première conséquence, le blocage des capacités d’accueil en master : alors que les effectifs en L3 ont augmentés de 40 %, les effectifs en master n’ont augmenté que de 17 % au niveau national, à Paris 13, malgré une augmentation des effectifs de 51 % en L3 les effectifs en master n’ont augmenté que de 2 %. Autres mesures d’économie : réduction générale des volumes horaires (plus particulièrement en L1), mise en place d’une année zéro avec horaires d’enseignement très réduits pour les « OUI SI » de Parcoursup, développement de l’apprentissage en master et, pour finir, quand il ne reste plus d’autres solutions, augmentation des effectifs par groupes de TD et de TP : en L2 à Paris 13 cette année, les TD se font par groupe de 55 étudiants en amphi… quand il reste des amphis disponibles… Filière informatique, filière d’avenir ? Le service public de l’ESR attend des investissements de l’État à la hauteur de l’ambition affichée, à moins que celui-ci n’ait déjà fait le choix de la dégradation des formations publiques pour laisser le marché privé investir le « filon »...


Voir en ligne : Mensuel du SNESUP n° 709, novembre 2022


Cet article est paru dans le mensuel du SNESUP du mois de novembre 2022, dans le dossier spécial « Enseignement supérieur et recherche : les conséquences d’un sous-encadrement organisé »